Rouges jardinspar Guy Grandjean
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Rencontre avec la terreur

Médecine

En trente ans de prise de sang, j’ai rencontré cinq fois la terreur. Pas celle du petit enfant qui est commune malheureusement en médecine, et parfois difficilement maîtrisable : nos moyens actuels d’anesthésie aplanissent ces difficultés.

 Un adulte terrifié : physiquement, c’est une autre affaire. Là aussi, si on est pressé, les moyens de sédation ne manquent pas, suppositoires, gouttes, injections.

Mais au labo, je n’ai rien de tout cela, à part le patch anesthésique, qui ne se révèle pas pertinent dans ces cas, la peur submerge tout.


La terreur

La terreur

Trois fois, ces personnes étaient handicapées, mais à chaque fois, les échanges étaient possibles. Deux autres fois, c’était la rencontre avec la mystérieuse grande phobie.

Pour les personnes handicapées, comme pour tout le monde, j’étais décidé à respecter cette demande médicale, à faire ces prises de sang, qui rassurent tout le monde. Mais comment faire devant le refus ? Les trois fois les négociations ont été longues, et les parents y participaient activement. Montrer l’aiguille, s’en servir sur une tierce personne consentante, picoter la peau avec, finalement prendre le temps de familiariser la personne avec cet acte un peu invasif. Discuter patiemment, répondre gentiment, parfois fermement, chercher les arguments qui touchent. Rien n’était écrit à l’avance.

Curieusement, deux fois sur trois, la prise de sang a eu lieu debout, comme si, assises, ces deux personnes se sentaient à la merci de l’autre, fragilisées. Nous sommes fondamentalement des bipèdes !

Les trois fois, les personnes étaient contentes, une très heureuse même, d’avoir eu sa prise de sang. J’ai même eu le droit une fois à la bise !

Quant aux personnes phobiques, c’est plus simple : ne pas brusquer, ne pas se presser, sentir cette peur que l’on peut maîtriser par exemple en respirant amplement et régulièrement de concert : ce que je fais moi-même souvent, comme pour leur montrer que je respecte cette peur. Le comportement irrationnel ne peut être jugé, même si il est plus facile de le mépriser, du haut de nos neurones très éduqués, en apparence.


La vie est un continuum, un patchwork

La vie est un continuum, un patchwork