Rouges jardinspar Guy Grandjean
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La biologie d’un regard

Médecine

Quand Homo sapiens échange avec un autre Homo sapiens, c’est pour une bonne part un échange de paroles, voire d’écrits depuis quelques siècles.

Mais Homo sapiens commence sa vie de toute autre façon.

Plongé dans un monde de mots indéchiffrables, il ne perçoit que l’émotion qui enrobe ces mots.

C’est donc tout naturellement que nos explorateurs en blouse blanche ont interrogé la relation homme animal pour tenter d’explorer la biologie de cette communication non verbale.

 

Et c’est notre plus proche ami le chien, qui a eu les honneurs ce cette interrogation. Ces hommes en blanc ont imaginé un sketch très simple :

prenez un brave chien et son maître, ou sa maîtresse, laissez les ensemble un moment. Insistez sur les échanges de regards, ce lien mystérieux qui s’établit entre les deux.

Puis dosez chez chacun d’eux l’ocytocine, une hormone sécrétée par l’hypophyse. Cette hormone est connue depuis longtemps pour provoquer la lactation, et les contractions utérines au cours de l’accouchement.

On suspecte cette hormone d’avoir bien d’autres rôles.

Ici, en l’occurrence, très clairement, le taux d’ocytocine est proportionnel au temps de regards échangés, chez l’un, comme chez l’autre !

Certains l’ont baptisé hardiment « l’hormone de l’amour ». Car on a constaté son augmentation au cours des échanges amoureux, au simple son de la voix, après un câlin. On pourrait l’appeler aussi « l hormone du bien être ».

Un deuxième sketch consistera à pschitter un coup de spray d’ocytocine dans la truffe des toutous. Vous verrez nos amis les chiens rechercher activement le contact visuel. Et surprise, en dosant l’ocytocine, chez les deux, vous serez ébahis d’admettre son augmentation chez le maître, non pschitté bien sûr.

Ce qui est concordant avec les résultats d’une expérimentation récente, proposée à des parents volontaires. En leur pschittant de l’ocytocine dans les narines, on observait de plus longs contacts visuels avec les enfants, et surprise, les taux d’ocytocine augmentaient aussi chez leurs enfants,
non pschittés bien sûr… On a observé le même comportement avec des enfants autistes ayant testé l’ocytocine.

N’allez pas conclure hardiment que « pschittez-vous les uns les autres » aie de bonnes chances de succéder aux histoires d’amour ou autres recommandations religieuses : « Aimez-vous les uns les autres » ! Non.

Les primates testés réagissent d’ailleurs différemment : les singes dominants deviennent plus agressifs, les dominés augmentent le temps de toilettage…

Donc, ça ne marcherait probablement pas ! Le Business plan des bons docteurs mercantiles partirait en fumée, et rapidement, la « qualité » des relations humaines ne dépendent pas que d’une hormone, ça se saurait déjà !

Mais admettez que les interactions sociales provoquent  des bouleversements hormonaux qui sont loin d’être anodins.

Et qu’après avoir longtemps étudié, dans le sillage de Hans Selye, la biologie du stress, voici maintenant la biologie du … regard.

Je comprends bien ce proverbe Ouzbek

« Si le coeur ne contemple pas, l’oeil ne voit pas »