Rouges jardinspar Guy Grandjean
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Savoir ce que parler veut dire

Humeur


OGM décorant une cathédrale

OGM décorant une cathédrale

Notre langage nous habite, le moindre nouveau mot s’insère, ou pas, dans notre corps tout entier. Chaque mot nouveau trouve, ou pas, ses connections avec notre univers mental, propre à chacun.

Tout le monde parle d’OGM, et donc tout le monde associe organisme à gène. Normal. C’est super, c’est le progrès, c’est de la belle et bonne science ! Domestiquer des levures au point de leur faire synthétiser de l’insuline, c’est proprement merveilleux. Le biologiste, le médecin en sont heureux. Une insuline mieux tolérée que celle du cochon, ou du bovin, qui l’avaient précédée. Le patient diabétique, lui, renaît à la vie.

Espérer un jour faire la peau des moustiques Aedes qui nous pourrissent la vie avec la Fièvre jaune, la Dengue, le Chikungunya, et le Zika, le nouveau venu, pourquoi pas… Empêcher la terrible mouche, la lucilie bouchère, de s’installer en Afrique, en stérilisant les mâles, a été un succès remarquable.

Mais les OGM utilisés en agriculture, ce n’est pas « que du gène » !

Et c’est là où le bât blesse, c’est là où les mots peuvent tromper.
En 1976, sont nées ces chimères de laboratoire. Les gènes sont les legos du vivant. Tous les puzzles sont imaginables, et s’offrent aux désirs du moment. Le mot transgénèse est né peu après. Les généticiens ont choisi leurs mots, pour le grand public. La mode des acronymes tombait bien : c’est précis, et si ça sonne bien, leur adoption se fait facilement. OGM a été choisi, une espèce de mot fourre-tout.

Ce que ne dit pas le sigle OGM, c’est que les premières plantes de grande culture utilisées dites OGM sont tolérantes au glyphosate. Ce n’est pas forcément hyper gênant pour le coton ; rares sont les mangeurs de coton. Mais de le trouver en bonne quantité dans le coton des tampons féminins mérite peut-être qu’on s’y arrête quelques instants.

En effet, ces plantes OGM sont imprégnées de glyphosate, mais elles n’en meurent pas, contrairement à toutes les autres plantes voisines gênantes, car compétitrices. Ces dernières en meurent sur le champ, pourrait-on dire.

Ce n’est pas pareil.

On a du gène, mais pas que… l’herbicide qui imprègne la plante est vendu avec.

On devrait dire, au minimum, OGMRG : OGM résistantes au glyphosate. Ou OGM glyphosate, puisque ces plantes en contiennent et quand nous les consommons, nous en consommons. On peut même les appeler : plantes glyphosates. Plus réaliste qu’OGM. Même si l’appétit en prend un coup.

Cette molécule semble très peu toxique, mais il semble ne pas en être de même quand elle est associée à un tensio-actif. Ce « savon » modifie la membrane cellulaire, et permet une pénétration de la molécule dans la machinerie cellulaire. Ce petit « détail » explique en partie les grandes divergences entre les études de toxicité sur le Round-Up. Bien entendu, seules les études faites à partir de la préparation commerciale sont pertinentes.

Et ce sont celles-là qui ont provoqué la récente reclassification de cet herbicide. Il serait d’ailleurs tout à fait impensable de l’interdire brutalement en agriculture: la plupart des autres herbicides se sont avérés plus nocifs pour l’environnement.

Changer le modèle agricole sera un très long chemin…

Dont voici un début…

La meilleure manière de cultiver les vignes est de les sarcler régulièrement pour empêcher la compétition verte, celle qui existe donc pour toutes les plantes. Et le sol s’en porte bien mieux. Mais elles peuvent être désherbées au glyphosate, à bien moindres frais.. Quand elles ne sont pas désherbées du tout, elles subissent une concurrence des « mauvaises herbes » dont certaines sont très compétentes pour les priver de tout, à commencer par l’eau.


Vignes non désherbées: elles deviennent minables très rapidement, victimes de la compétition verte.

Vignes non désherbées: elles deviennent minables très rapidement, victimes de la compétition verte.

On comprend donc le formidable engouement pour le Round Up, ce glyphosate a priori peu toxique. Seulement voilà : quand le sol n’est plus travaillé, et que les herbes deviennent rares, il se bétonne, et son activité biologique s’affaiblit d’autant. Du coup, le glyphosate n’est plus biodégradé, et il se retrouve dans les eaux de ruissellement.

Les cultivateurs savent bien que l’alternative à moins de glyphosate, voire plus de glyphosate du tout, c’est du travail . Or le travail n’est plus justement valorisé dans nos sociétés. Et le robot désherbeur n’existe pas encore. Demandez aux entrepreneurs autour de vous : entre autres, ils rêvent tous à deux choses : la baisse de la masse salariale et la dématérialisation.

Lois incontournables de la guerre des prix.

La guerre économique, qui fait rage, a succédé à la guerre tout court.

Voilà pourquoi des plantes cultivées sans herbicide sont vendues plus chères, voire bien plus chères. Il ne peut pas en être autrement, dans notre vision économique actuelle. A chacun de choisir, mais globalement seuls les circuits courts peuvent permettre aux bourses un peu plates de manger des produits sains. La concentration en glyphosate dans les eaux de toute nature, y compris les eaux de pluie, est pour l’instant faible. Mais nous allons tous la voir, la boire, en augmentation continue… Voilà pourquoi le vrai sens d’OGM est
Organism Glyphosate Mixed ! Mélange de plante et de glyphosate !


Oiseau chimère.

Oiseau chimère.