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Histoires de Lyme, larmes de l’ignorance

Bactériologie


Les migrants, peinture murale à Nantes

Les migrants, peinture murale à Nantes

Si la « maladie de Lyme » est une expression récente, née dans les années 1980, le germe en cause existe depuis bien longtemps, puisqu’on en trouvé des traces chez Ötzi, l’homme des glaces, âgé de 5000 ans. Son cheval de Troie, son transporteur, la tique, se nourrit du sang de toute sorte d’animaux. En Europe, celle que les hommes attirent, Ixodes ricinus, est capable de nous inoculer au moins une dizaine de micro-organismes différents ! Dont le plus récent, un Thogotovirus, a été découvert en 2014.

Ce qui ne facilite pas le travail des médecins, ni celui des biologistes.

Suivant les conditions écologiques, ces bestioles peuvent pulluler, et ça ne date pas d’hier.
En 1754, le naturaliste Pehr Kalm note « la pullulation de ces viles petites créatures à des taux si choquants » pendant son voyage aux States. Dans sa thèse de 2005, « Le diable dans ses détails »,  Mary Drymon Derose décrit la possibilité d’épidémies de la maladie de Lyme au XVII ème siècle dans le Massachusetts.

 Les migrants à cette époque vivent des périodes de sécheresse extrême, de privations terribles. Entre la rigueur folle du puritanisme, la pression guerrière des amérindiens, et les difficultés de survie,  les historiens parlent d’une atmosphère paranoïaque omni-régnante.
Ces défricheurs bouleversent les écosystèmes précédents, en toute innocence. Que des chaines de prédation soient modifiées, et des pullulations intempestives d’animaux explosent, au gré des conditions climatiques.

En 1692, des femmes présentant manifestement des troubles neurologiques et dermatologiques furent accusées de sorcellerie, et brûlées sur la place du village de Salem :  on ne badine pas avec les comportements étranges, et malheureusement quelques maladies en engendrent de spectaculaires ! Mary Drymon Derose pense aux signes de Lyme…

Pour comprendre la plus grande prévalence de ces troubles chez les femmes et les enfants, que chez les hommes, une équipe a pratiqué l’expérience suivante : une femme et un homme, habillés à l’ancienne, ont été invités à déambuler pendant une demi-heure une après midi ensoleillée d’octobre dans une région de haute infestation. Puis, comptage des tiques .
homme 14
femme 56
A cette époque, jupes et jupons formaient une belle surface d’accroche !


Cette maladie est bien plus fréquente aux Etats-Unis qu'en France

Cette maladie est bien plus fréquente aux Etats-Unis qu’en France

300000 cas de Lyme par an aux Etats-Unis, le moustique ne fait pas mieux.
C’est donc l’infection vectorielle la plus fréquente dans ce pays.
Et pourtant, il fallut attendre 1980 pour la comprendre !

Et ce sont deux femmes non médecins qui sont à l’origine ce cette découverte.
En 1975, à son retour de vacances, le médecin David Snydman, responsable
de santé publique, lit deux lettres, de Polly Murray, une artiste peintre,
et de Judith Mensch, psychiatre. Elles ne se connaissent pas.
Mais toutes deux décrivent l’épidémie d’arthrites dans la région de Lyme, en relation probable avec des piqûres de tiques.
Elles ont vu tant d’enfants aux genoux gonflés, tant de personnes jeunes « béquiller ».

Détail piquant : elles avaient toutes deux prévenu le CDC d’Atlanta, la Mecque des épidémiologistes, qui les avaient renvoyées toutes deux sur les roses en répondant :
« l’arthrite ne fait pas partie des maladies transmissibles «. Ce qui est une réponse disons, idiote, car une banale chaude pisse peut se compliquer d’arthrite, et c’est très facile à déléguer !
C’est le médecin Allen Steere, jeune rhumatologue, qui s’intéressa le premier à cette « arthrite de Lyme » devenant rapidement « maladie de Lyme », à la reconnaissance de symptômes multiples.
En 1981, enfin, le grand spécialiste Burgdorfer met en évidence la bactérie Borrelia chez ces tiques.
Tous ces médecins relient cette maladie à des descriptions européennes datant d’un siècle, mais restées sans avis biologique.


La Borrelia, spiralée, est une bactérie  très rapide en milieu gel

La Borrelia, spiralée, est une bactérie  très rapide en milieu gel

Aux Etats-Unis, les deux grands pourvoyeurs de tiques sont les souris à pattes blanches, et les cerfs de Virginie, à queue blanche (!) Si les populations augmentent, ces gros acariens pullulent d’autant. Quand le loup ou le chasseur manquent pour freiner les cervidés. Quand les rapaces manquent pour chasser le rongeur. Dures lois de la prédation !

Moralité : pour éviter les médecins et les biologistes, suspects malheureusement d’incompétence dans ce domaine, éviter les piqûres, et explorer les peaux après des ballades exposées.

Attention, les formes jeunes peuvent être toutes petites !


Les grandes ballades nature sont suivies de papouilles inspectrices

Les grandes ballades nature sont suivies de papouilles inspectrices

PS du bio : à un dernier contrôle de qualité sur un sérum négatif, 30 % des réponses ont été rendues (faussement) positives sur un test, le Western Blot . Il devrait donc être interdit de le faire, en première intention, en cas de dépistage négatif. Dure dure, la vie des biologistes !