Rouges jardinspar Guy Grandjean
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Les efflorescences algales,de la beauté pure à la perfidie.

Nature

Bouquet rouge

Bouquet rouge

Ces algues rouges sont visibles sur nos côtes, découvertes au moment des basses mers. Ces végétaux sont peu connus en France. Mais le Nori, qui noircit à la cuisson, est l’algue la plus consommée au monde, et en France, car c’est elle qui entoure les fameux sushis. Les japonais la consomment depuis fort longtemps, et ils la cultivent depuis plus d’un siècle. Les Bretons ont pris le relais en récoltant le Wakame, la Laitue de mer, le Nori, la Dulse… qui commencent à s’inviter sur nos tables.


L'algue à vache : la dulse était donnée au bétail, et consommée par les Irlandais. Sans doute un précieux recours dans les épisodes de famine, si fréquents en Europe jusqu' à "la révolution verte". En Bretagne, dans les îles, les vaches allaient d'e…

L’algue à vache : la dulse était donnée au bétail, et consommée par les Irlandais. Sans doute un précieux recours dans les épisodes de famine, si fréquents en Europe jusqu’ à « la révolution verte ». En Bretagne, dans les îles, les vaches allaient d’elles mêmes brouter cette algue rouge, quand les paysans leur laissaient accès aux basses mers. (Kerluz en breton) Attention, les rochers étaient un peu casse pattes.

Mais, en terme d’importance écologique, ces couverts d’algues ne représentent rien à côté des immenses populations d’algues microscopiques, ce qu’on appelle le phytoplancton, dont certaines bactéries, les cyanobactéries font partie également. En fonction de la température, de la lumière, et des nutriments, elles peuvent proliférer très rapidement par moments : c’est la floraison algale, le « bloom » en anglais, ou mieux l’ efflorescence algale : à prononcer doucement, en insistant sur le F, c’est vraiment un joli mot.


Au Cap Nord,  les algues planctoniques prolifèrent à la belle saison. 

Au Cap Nord,  les algues planctoniques prolifèrent à la belle saison.

 

Ces manifestations spectaculaires de prolifération sont vieilles comme le monde. En Arctique, elles débutent au printemps, avec la luminosité qui réveille tout ce petit monde endormi. Le premier étage de la chaine alimentaire se met en place. Avec les cyanobactéries, qui sont consommées en masse par le zooplancton, formidable ressource pour toutes espèces de poissons. Ces floraisons peuvent s’observer aussi en été, en fonction des différentes conditions environnementales. On les connait mieux depuis qu’on sait les photographier par satellite, la couleur dépendant de la concentration en chlorophylle, molécule pivot de la photosynthèse.

 

Le golf de Gascogne, efflorescences en face de la Gironde. 

Le golf de Gascogne, efflorescences en face de la Gironde.

 

Ce phytoplancton est un deux poumons de la planète. Le plus important, car il fournit plus de la moitié de l’oxygène de l’atmosphère, à travers les échanges eau – air. L’autre, ce sont tous les végétaux terrestres, dont la fameuse forêt amazonienne, promue il y a quelques années comme fournisseur majeur, mais qui a en ce moment du mal à résister à la déforestation. Le Brésil est devenu premier vendeur mondial de soja, destiné aux élevages européens, aux dépens de la forêt bien sur, mais les producteurs cette année ont signé un accord sur l’arrêt de son extension. Un espoir ?


L'atmosphère, fine couche d'air protégée par la couche d'ozone.

L’atmosphère, fine couche d’air protégée par la couche d’ozone.

La terre se comporte comme une énorme être vivant. Elle respire. Son atmosphère est riche de 21 % d’oxygène, taux constant depuis l’origine. Cet élément vital a été produit essentiellement par le plancton végétal et les bactéries photosynthétiques aux débuts de son histoire . Cet oxygène aquatique libéré dans l’air a permis la formation de la couche d’ozone de la haute atmosphère. Sans cette protection contre les rayonnements ultraviolets du Soleil, la vie aurait été simplement inenvisageable sur terre, il y a six cent millions d’années.

 

Si les UV solaires n'étaient pas arrêtés par la bienfaisante couche d'ozone, le soleil se transformerait ipso facto en ennemi mortel en nous brûlant comme de vulgaires saucisses pour barbecue.

Si les UV solaires n’étaient pas arrêtés par la bienfaisante couche d’ozone, le soleil se transformerait ipso facto en ennemi mortel en nous brûlant comme de vulgaires saucisses pour barbecue.

Un autre rôle majeur est son action sur le climat. Le gaz carbonique, le CO2, dont la concentration augmente régulièrement dans l’atmosphère, est facilement soluble dans l’eau, donc dans les couches superficielles des océans. C’est le composé principal consommé par la photosynthèse, pompé par le phytoplancton. Là où il est absent, l’eau s’acidifie. En gros l’acidité moyenne des océans a quand même augmenté d’un tiers en deux cent ans, ce qui est considérable, chiffrée par une baisse de Ph 8,2 à 8,1. L’absorption de CO2 est cent fois plus rapide que ce qui a pu se passer ces trois cent derniers millions d’années. Il est donc ultra temps de réagir. On est incapable d’évaluer la masse globale de ce plancton, et son évolution récente, trop complexe. Mais son rôle régulateur est clairement une merveilleuse nécessité pour la vie aquatique,  pour la planète, donc pour nous.


Le Dinophysis, Photo IFREMER

Le Dinophysis, Photo IFREMER

En revanche, ces efflorescences algales sont bien plus importantes, dans les océans près des côtes, et les plans d’eau fermés, les cours d’eau, depuis quelques dizaines d’années. On parle d’eutrophisation quand ces pullulations rendent le milieu aquatique impropre à la vie. Les concentrations en algues microscopiques deviennent alors prodigieuses. Ces floraisons sont catastrophiques quand les espèces en cause produisent des toxines, elles sont dites alors toxinogènes. Pratiquement toutes les côtes sont menacées par ces phénomènes, dus principalement aux rejets agricoles et urbains. Bien entendu, elles sont particulièrement surveillées en zone de conchyliculture.

Vous pouvez choisir la toxine diarrhéique du Dinophysis, la toxine paralysante de l’Alexandrium, ou la toxine amnésiante de la Pseudo-nitzschia, au choix. Surveillance en France par le réseau REPHY.