Un vaccin épique
Un vaccin historique
Un des germes les plus dangereux qu’ait connu l’humanité est une bactérie transportée par les poux. Il a accompagné les armées, les populations vivants dans des conditions misérables depuis fort longtemps.
Dès que le niveau d’hygiène baisse, que les habits sont moins lavés, et les poux abondants, le typhus menace.
Bien sur il régnait dans les camps hitlériens, dernier grand malheur.
Pour fabriquer un vaccin contre le typhus, il fallait cultiver des bactéries, les Rickettsies. On ne savait les reproduire que dans leur « habitat » naturel, le pou. Mais le pou humain dédaigne la souris de laboratoire, comme tous les autres animaux disponibles. Restait l’homme, il fallait donc des volontaires. C’est le professeur Rudolf Stephan Weigl à Gdansk, qui le premier a fabriqué ce vaccin. L’élevage des poux se conduisait donc à même la peau, dans de petites boites (6 cm), que l’on portait douze jours.
La Pologne se sentait particulièrement concernée. La grande précarité dans les campagnes favorisait le portage de poux, et les épidémies de typhus étaient fréquentes. A sa porte,l’URSS avait connu une épidémie gigantesque, des dizaines de millions de cas, des millions de morts. Une fois les poux récoltés, ils étaient ensuite immobilisés sur le dos dans cet appareil de contention. Avec une microcanule, sous microscope, l’intestin des poux était ensemencé de bactéries, nos petites Rickettsies. Un bon opérateur pouvait ainsi « sodomiser » mille poux par jour.
Un vaccin nécessitait 150 contenus intestinaux, qu’il fallait récupérer. Le laboratoire fabriquait 2000 doses par mois, c’était un vaccin onéreux. A dire vrai, c’était aussi extrêmement dangereux. Le professeur Weigl a reçu le titre posthume de « Juste parmi les nations ». Pendant la Shoah, il sauva de nombreux Juifs, des résistants polonais, en les hébergeant, au péril de sa vie.
Toute personne suspecte d’aider les juifs était immédiatement abattue par les nazis. Il fournit aussi le vaccin en contrebande aux ghettos de Lwo’w et de Varsovie, épargnant, hélas provisoirement, de nombreuses vies.