La queue à deux euros
Deux fortes incisives : c’est un ragondin, un rongeur qui peut atteindre sept kilos à l’âge adulte.
L’impact du réchauffement sur la vie des microbes est désormais visible : on ne parle plus d’hypothèses plus ou moins pertinentes, comme » le retour du palu » par exemple, qui s’est installé dans le passé dans bien des zones froides. Les gaz à effet de serre nous change d’air et d’ère, l’humanité goûte les turpitudes d’une nouvelle époque, un nouveau monde, des écosystèmes instables, changeant à grande vitesse. Ca tangue !
Une maladie retient l’attention : maladie peu connue du public, la « maladie des rats », ne concernait il y a peu que les professionnels exposés à ces animaux, et à l’eau contaminée par leurs urines : les égoutiers en tête, les éboueurs, les métiers pratiqués en eau douce.
En cause, une bactérie spiralée, qui possède la rare propriété de traverser les muqueuses, et même la peau macérée. De très nombreuses espèces animales l’hébergent. Les professionnels des métiers à risque peuvent bénéficier d’un vaccin, le Spirolept, sur la base d’un injection sous cutanée tous les deux ans. Elle n’est efficace que sur certaines formes, les plus graves, de la maladie.
Les températures estivales en augmentation favorisent les basses eaux, et leur stagnation. L’été 2016, particulièrement chaud et sec, a rendu la Vilaine bien paresseuse, et la pullulation de rongeurs d’eau a fait le reste, en ensemençant la rivière de leurs urines. On a notifié au moins quatorze cas de leptospirose chez des kayakistes cet été là.
La leptospirose devient donc un problème de santé publique, avec le succès des sports et jeux en milieu aquatique en été. C’est une zoonose cosmopolite souvent mal diagnostiquée, et fréquente dans le monde entier, le climat chaud et humide de la zone intertropicale lui est particulièrement propice. La bactérie étant bien sensible aux antibiotiques, c’est une maladie facile à traiter, même les formes graves, quand on y pense.
De nombreux animaux peuvent excréter ces bactéries. Le chien par exemple y est sensible, et justifie la présence du vaccin dans l’hexavalent proposé par les vétérinaires. Les bovins aussi, avec des zones plus ou moins touchées. De nombreux animaux sont porteurs sains, et peuvent vivre avec ces bactéries qui les colonisent, au niveau rénal en particulier, sans leur nuire. Certains biologistes parlent même de symbiose…
Mais ce sont des rongeurs qui nous gênent le plus.
Le ragondin et le rat musqué, tous les deux d’origine américaine, se sont installés au XX ième siècle en Europe dans certaines régions à réseau hydrographique important. Comme tous les rongeurs, ils ont une propension à proliférer. Mais ils ne connaissent que peu, ou pas de prédateurs, ils sont de belle taille, méfiez vous des dents d’un ragondin de sept kilos en pétard. D’où la nécessité pour les hommes de contenir les populations dans certaines régions où leur nombre devient gênant. Ce qui n’est pas simple, car on a interdit l’usage des poisons, essentiellement les anti-coagulants : terminées les cages avec les carottes empoisonnées. Trop dangereux. Trop polluant.
Ce sont donc des piégeurs, et les chasseurs qui s’occupent de cette besogne scabreuse mais nécessaire, ces animaux pouvant alors être qualifiés de nuisibles. Ils sont rémunérés à la queue congelée rapportée, et le prix récemment est passé à deux euros.