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La mort de treize chiens : qui est responsable, et pourquoi sont-ils morts ?

Ecologie

 

 

L’arbre tombophile

 

 

 


Eau de Sèvre nantaise

Eau de Sèvre nantaise

Ces dernières semaines, treize braves toutous sont morts d’avoir pataugé et bu de l’eau de nos rivières. C’est exceptionnel, « ça fait flipper », « ça met les boules » « ça fout les jetons »! Les phosphates et les nitrates forment le couple maudit de l’eau, de la chimie, celui qui entraîne la prolifération des cyanobactéries, ces micro algues bleues comme le Cyan. Et pourtant ! Une rivière bleuie de ces microorganismes s’avère quelque fois un spectacle magnifique !

Ces micro algues peuvent fixer et assimiler directement l’azote de l’air, et donc un taux de phosphates élevé suffit pour leur développement. Même si ce sont les nitrates qui font souvent la une des journaux ! Selon l’Agence de l’Eau Loire-Bretagne, le phosphore est à 65 % d’origine agricole, le reste provenant d’une origine urbaine, pour moitié  de nos déjections, et moitié de nos lessives.

Quant aux phosphates d’origine agricole, les engrais et les lisiers excédentaires en sont les principaux pourvoyeurs. Les deux autres facteurs, physiques cette fois ci, de la formation de « bloom », véritable explosion alguale, ont trait à la stabilité des eaux, et à leur réchauffement. Et là ça se corse.

 

 


Les fleuves suisses sont souvent indemnes de phosphates, nitrates. Leur couleur, turquoise pâle, cyan presque, est somptueuse.

Les fleuves suisses sont souvent indemnes de phosphates, nitrates. Leur couleur, turquoise pâle, cyan presque, est somptueuse.

Le bassin de Loire a connu trois grandes périodes. Dans les années 1950, les eaux fluviales étaient vierges de notre couple infernal. Les lavandières pouvaient taper sur leur linge en cadence, en chantant, sur l’Erdre, comme sur la Sèvre nantaise.  La concentration urbaine, sans stations d’épuration, avec les lessives phosphatées, et l’usage massif en agriculture des engrais minéraux, puis des lisiers des élevages industriels ont ensuite pollué d’abondance les cours d’eau. Les phénomènes d’eutrophisation apparurent un peu partout en fin d’été. Les taux d’oxygène qui s’effondrent rapidement sont graves pour ces rivières, toute vie disparait pour quelques mois. Dans les années 1980, la prise de conscience est générale, et la lutte contre ces excès commence, avec depuis une baisse faible mais régulière des taux de nitrates et de phosphates. Mais on est encore loin du compte.

Et c’est le réchauffement climatique qui vient brouiller la donne. Les basses eaux, stagnantes, dues à un déficit en pluies et en neige important, sont colonisées par ces algues bleues toxiques. Dans l’enquête qui a suivi la mort violente des chiens, c’est Oscillatoria et Formidium qui ont été incriminées, particulièrement toxiques quand elles abondent. Ces proliférations alguales profitent du taux de phosphates encore trop importants dans nos cours d’eau.

Pourquoi sont-ils morts ? La réponse ne peut être que celle ci : pour nous faire prendre conscience des gravissimes atteintes à notre habitat primordial, et qu’enfin on réfléchisse à nos habitudes mortifères de notre « business as usual » !

 

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Photo Anne Beringuer