Rouges jardinspar Guy Grandjean
search icon
Retour

Ibn Sina : la vie ne se mesure pas à sa longueur, mais à sa largeur

Médecine

 

 

Un chevalier, qui surgit au galop.

Le mot « dépression « est une expression médicale récente, succédant au mot mélancolie employé les siècles précédents. Le mot mélancolie, qui donnait aussi mélancolieux, désignait un « état » émotionnel, plus qu’une « maladie », et était, dans ce sens, une dénomination plus pertinente ce cette atteinte de l’âme. Mais la médecine toute puissante ne s’embarrasse pas forcément de nuances sémantiques. Elle a adopté le nouveau vocable, “dépression”, et l’a utilisé dans ce sens psychologique dès le XIX ième siècle.

Qui dit maladie dit traitement, qu’on appelle maintenant antidépresseur en l’occurence. Le mot mélancolie disparaît, emporté dans le flot des messagers neuronaux divers. Les peines de cœur, les souffrances psychologiques diverses trouvent des indications à des thérapies médicamenteuses sophistiquées, le plus souvent avec un certain succès, parfois passager.

Les médecins anciens n’étaient pas forcément dénués de tout pouvoir thérapeutique devant ces peines de l’âme.

H. Ben Romdane a écrit une histoire de la médecine arabe du VIII ème au XIII ème siècle. Il y parle d’Avicenne, Ibn Sina en arabe. Ce médecin, né vers 980, a laissé une œuvre impressionnante, qui a influencé l’Europe jusqu’au XVII ème siècle.

 

 


Longtemps connu de toutes les universités européennes

Longtemps connu de toutes les universités européennes

Ce génie précoce, connaissant l’intégralité du Coran à l’âge de dix ans, déclara sans forfanterie (?) à 18 ans avoir pris connaissance de toutes les sciences de l’époque. Il fut plus tard appelé « le Prince des médecins », ayant abordé de nombreux domaines.

A cette époque, la science et la médecine arabes étaient à la pointe de la connaissance, ayant absorbé, puis dépassé tout le formidable apport grec initial. Les savants avaient également ramené d’Inde une numération maligne, les fameux chiffres que l’on dit arabes.

Les chrétiens partis en croisade pour griller de l’hérétique, ramenèrent en Europe des pratiques médicales inconnues. La civilisation arabo-musulmane de l’époque fascinait par son raffinement, sa propreté, sa science. L’homme cultivé y était invité à occuper les plus hautes fonctions. Ce qui fut le cas d’Ibn Sina, et sa vie navigua au gré de ses protections politiques de l’époque.

Philosophe avant tout, Avicenne fut un défricheur dans de  nombreux domaines. On peut le considérer parmi les premiers biologiste médicaux, puisqu’il reconnut il l’existence d’un vers parasite, l’ankylostome.

 

 


Oeuf d’ankylostome, visible dans une selle examinée au microscope.

Oeuf d’ankylostome, visible dans une selle examinée au microscope.

Il propagea l’idée que la tuberculose était une maladie contagieuse. Il observa le rôle du rat dans les épidémies de peste.

Entre autres, Avicenne fut le fondateur de la « psychiatrie « dans son pays, en reconnaissant « les troubles mentaux » comme accessibles à la thérapeutique. Curieusement, il classa l’amour parmi les maladies. (Il aurait écouté avec plaisir “Fou d’amour” de Johnny !)

H. Ben Romdane rapporte cette histoire :

« Un jour, Ibn Sina fut appelé à soigner un prince atteint d’une maladie rare, le syndrome de Cotard. C’est une variante de la mélancolie délirante.

L’homme se prenait pour une vache, il beuglait et voulait qu’on le tue pour manger sa viande. Son état empirait, il refusait toute alimentation. Ibn Sina, alors Vizir de l’Emir Chams al-Dalwa lui envoya un messager l’invitant à se réjouir car un boucher allait venir l’égorger.

 

 

Quelques jours plus tard, Ibn Sina se présenta, un couteau à la main en criant : « Où est donc la vache que je la tue ? »

Le prince beugla pour signaler sa présence. Ibn Sina lui fit lier les poings et les pieds, le tata sur tout le corps et déclara : il est trop maigre, il n’est pas bon à tuer, il va falloir l’engraisser.

On fournit au malade de la nourriture qu’il accepta.

Progressivement les forces revinrent, et avec elles, un véritable appétit, le sommeil, et enfin la guérison

Regard sur les cyanobactéries